Le glaive de l’anabaptiste


Récemment, je me suis intéressé aux œuvres de Ruben Saillens (1855-1942), pasteur Français ayant écrit plusieurs ouvrages en français et en anglais. Grâce à sa maîtrise de l’anglais (rare à son époque), il traduisit les paroles de bon nombre de chants, dont 53 chants qui se trouvent aujourd’hui dans le recueil célébrons Dieu, que mon assemblée au Québec utilise.

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Ruben Saillens était très intrigué par les anabaptistes, avec lesquels les baptistes partageaient une longue histoire commune. Il relate dans l’un de ses ouvrages sa rencontre avec un anabaptiste en Suisse. Il nous transmet aussi quelques récits datant de plusieurs siècles qui illustrent bien l’esprit de non-résistance qui les animait. Saillens lui-même remarqua que c’était là la différence majeure entre les anabaptistes et les baptistes ou les protestants.

Voici l’un des récits qu’il rapporte dans l’Ami de la Maison :

« Le dogme principal des anabaptistes, celui qui les distingue de toutes les autres sectes religieuses du continent européen (la Société des Amis, ou Quakers, étant surtout anglo-saxonne), c’est le principe de la non-résistance. Eux-mêmes s’appellent les Chrétiens sans défense ; ils refusent de porter des armes, même pour résister aux voleurs de grand chemin ; ils ne sont, par conséquent, ni soldats, ni gendarmes, ni gardes-champêtres ; ils prennent à la lettre l’ordre de Jésus-Christ : « Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre ». Ils ont l’héroïsme de la paix. Cette secte a vécu dans les pays du monde les plus batailleurs, et dans les époques les plus agitées, recevant des coups de tous les belligérants et n’en rendant jamais aucun ; foulée aux pieds par toutes les armées, comme l’herbe des champs sous le pas des chevaux, qui se redresse pour repousser ensuite drue et vivace comme auparavant.
Sur toutes les questions fondamentales : – foi dans la Bible et dans le Sauveur ressuscité – les anabaptistes ressemblent aux autres chrétiens évangéliques.
J’avais beaucoup entendu parler de ces anabaptistes, sans en avoir jamais vu un seul. J’avais lu sur leur compte des anecdotes très intéressantes ; celle-ci entre autres :
Un jour, pendant la guerre de Trente-Ans, en Allemagne, un parti de fourrageurs s’arrête devant la porte d’un anabaptiste :
« Eh ! Bonhomme, dit le chef de l’escouade, montre-nous un champ de trèfle où nous pourrons faire du fourrage pour les chevaux du détachement !
– Volontiers, répondit le vieillard, suivez-moi, Messieurs. »
Il conduit les soldats le long d’un chemin au bord duquel s’étalaient des champs superbes : « Il n’est pas nécessaire d’aller plus loin, mon vieux, dit l’officier ; voici du foin qui fera très bien notre affaire. »
Mais l’anabaptiste continua de marcher : « Faites-moi le plaisir, dit-il d’un air presque suppliant, d’avancer encore un peu ; je vous montrerai un champ où vous aurez de l’herbe en suffisance. »
L’officier, supposant que le bonhomme voulait leur offrir ce qu’il y avait de mieux dans le pays en fait de fourrage, continue à le suivre. On arrive enfin à une pièce de terre assez grande, mais où le trèfle n’était pas meilleur ni plus beau que celui qu’on avait passé :
« Voilà, Messieurs, prenez-en à votre aise !
– Mais pourquoi donc, cria l’officier en colère, nous avoir menés si loin, puisque tu ne nous donnes rien de mieux que ce que nous aurions pu récolter bien avant ?
– Je vais vous dire, répondit l’excellent homme. Les champs que nous avons vus sont ceux de mes voisins, celui-ci est le mien. Puisqu’il faut que quelqu’un soit dépouillé, j’aime mieux que ce soit moi. »
L’officier fut surpris de cette naïveté sublime, de cet héroïsme si simple, mais si supérieur au sien !
Aimez-vous ce genre de grandeur d’âme ? Ces anecdotes-là vous reposent-elles un peu des hauts faits guerriers, de l’odeur de sang et de poudre qui se dégage des annales de l’humanité civilisée ? » (L’Ami de la maison, juillet 1895)

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