Père et Fils

Un homme avait un fils qu’il aimait tendrement.
C’était son fils unique, un fils né sur le tard.
Le père se faisait vieux, mais son fils maintenant,
Était tout comme lui, expert en œuvres d’art.

Car l’homme était très riche et il collectionnait,
Des pièces inestimables dans sa grande demeure.
Son fils manifestait un œil, un goût parfait,
Des qualités d’homme d’affaire et d’acheteur.

Le vieil homme était veuf, cet enfant le comblait.
Entre ses mains expertes, l’héritage prospérait.
Il se réjouissait de le voir triompher
D’achats fort difficiles, sans jamais renoncer.

Au début de l’hiver, éclata un conflit,
Et le fils dû partir pour servir son pays.
Après quelques semaines, arrive la nouvelle,
Que le fils bien-aimé n’était pas à l’appel.

Le père très inquiet, chaque jour attendait,
Plus d’informations, espérant malgré tout
Que son fils vivait, qu’on le retrouverait.
La mort confirmée lui porta un grand coup.

Le jeune homme décéda, tentant de secourir
L’un de ses camarades blessé dans un combat.
Le père s’en remit mal et Noël arriva.
Un bien triste Noël, sans fils, sans avenir.

Sur le coup de midi, quelqu’un sonne à la porte.
Il s’agit d’un soldat, un paquet dans les mains.
Ami de votre fils, je reste le témoin
De son abnégation et de son âme forte.

Il m’a porté secours, par lui je fus sauvé.
Il en sauva plusieurs, il leur donna sa vie.
Puis-je entrer un instant, et vous montrer ceci.
Touché par ces paroles le père le fait entrer.

Ce fut l’occasion pour le jeune homme de dire
Au vieillard, que son fils parlait souvent de lui,
De leur amour commun pour l’art, de son plaisir
À progresser avec son père pour appui.

Je suis moi-même un peu artiste et j’aimerais
Vous donner cet objet, ouvrage de mes mains.
Le père découvre alors, dessiné au fusain,
Le visage charmant de l’enfant qu’il aimait.

Ce tableau n’était pas une œuvre de valeur,
Mais après que le jeune soldat fût parti,
Le père décrocha de leurs places d’honneur,
Les peintures de Monet, Picasso et Dali.

Et puis il accrocha le portrait de son fils,
De façon à pouvoir souvent le contempler.
Et cet humble dessin faisait tous ses délices,
Éclipsant à ses yeux les œuvres de musée.

Le vieil homme, au printemps, soudain tombe malade,
Plus rien ne le retient sur la terre des vivants.
Il est très bien soigné, mais meurt en peu de temps,
Et le monde de l’art, prépare ses escouades.

La collection de l’homme est vendue aux enchères,
Et elle recelait maint’ œuvres d’exception,
Recherchées, convoitées, souhaitées avec passion,
Qu’on prévoyait atteindre des prix spectaculaires.

Les enchères commencent par un tableau hors liste.
Il s’agissait de vendre un portrait au fusain.
Le commissaire-priseur était entré en piste,
Pour démarrer l’enchère à un prix anodin.

Les minutes passèrent, personne ne bougeait.
Quand, au fond de la salle, un homme s’exclama:
« C’est un portrait du fils, qui se soucie de ça?
Entrons vite dans les choses sérieuses, s’il vous plaît ! »

« Non, nous devons vendre ce tableau en premier.
Qui veut du fils? » Demande l’adjudicateur.
« Je n’ai que cent euros, pouvez-vous accepter?
Je connaissais le fils, faites-moi cette faveur. »

« J’ai là une offre de cent euros, qui dit mieux?
Après un long silence, la décision fût prise,
Une fois, deux fois, trois fois, adjugé à monsieur ! »
Soulagement de tous ces chefs d’entreprises.

« Maintenant, aux trésors ! » s’exclame l’un d’entre eux.
Le commissaire-priseur annonce très sérieux
Que les enchères sont achevées. Jugez du choc.
Les collectionneurs furieux, protestent en bloc.

« Nous venions acquérir des œuvres remarquables.
Ce que vous annoncez nous est inacceptable,
Expliquez-vous. »

L’homme interpellé répondit:
« Le fils mort, un nouveau testament fut écrit
Où selon les dernières volontés de son père,
Quiconque, se serait décidé pour le fils,
Aurait acquis ainsi, tout le reste, gratis. »

-Annick Markmann

Souviens-toi du jour du repos pour le sanctifier

Traduction d’un article en anglais de Bob Goodnough paru en 2012 sur son site en anglais: https://flatlanderfaith.com/2012/09/22/remember-the-sabbath-day-to-keep-it-holy/

« Souviens-toi du jour du repos pour le sanctifier; Tu travailleras six jours, et tu feras toute ton oeuvre; Mais le septième jour est le repos de l’Éternel ton Dieu; tu ne feras aucune oeuvre en ce jour-là, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton bétail, ni l’étranger qui est dans tes portes; Car l’Éternel a fait en six jours les cieux et la terre, la mer et tout ce qui est en eux, et il s’est reposé le septième jour; c’est pourquoi l’Éternel a béni le jour du repos et l’a sanctifié. » (Exode 20.8-11).

Ces paroles ont été prononcées par Dieu depuis le mont Horeb. Nous ne pouvons pas les rejeter comme s’il s’agissait d’un autre peuple, d’une autre époque et d’un autre lieu. Mais n’est-ce pas à peu près ce que nous faisons lorsque nous appelons le dimanche le sabbat et que nous disons que nous observons le sabbat en nous abstenant de tout travail rémunéré et en allant au culte (à l’église) ?

Tout d’abord, lisons-nous quoi que ce soit dans le commandement au sujet du culte ? La Loi ordonnait que tous les hommes se présentent devant le Seigneur à Jérusalem trois fois par an, lors des fêtes de la Pâque, de la Pentecôte (également appelée Semaines ou Premiers Fruits) et des Tabernacles. Point final. Aucun autre culte public régulier n’était ordonné dans l’Ancien Testament.

Le principe de la célébration hebdomadaire du sabbat dans une synagogue n’est pas ordonné dans l’Ancien Testament. Il s’est développé pendant la captivité babylonienne et a sans doute été la pratique générale après le retour de la captivité, bien qu’il ne soit jamais décrit. Synagogue est un mot grec qui signifie assemblée ou lieu de réunion, et c’est le terme qui était utilisé à l’époque du Nouveau Testament. Le terme « synagogue » n’apparaît pas dans l’Ancien Testament.

Ce commandement interdit au croyant d’effectuer un travail quelconque ou de profiter du travail d’autrui, qu’il s’agisse de serviteurs, d’animaux ou de non-Israélites. Pouvons-nous prétendre faire cela aujourd’hui ? Nous attendrions-nous à ce que Dieu se satisfasse d’une obéissance partielle à l’un des autres commandements ?

Pourtant, dans le Nouveau Testament, nous trouvons Jésus qui semble faire tout ce qui est en son pouvoir pour violer le commandement du sabbat. Lors de la guérison de l’aveugle de naissance, relatée dans le neuvième chapitre de l’Évangile de Jean, Jésus crache sur le sol, fait de la boue et l’étale sur les yeux de l’homme. Il demande ensuite à l’aveugle de travailler en allant à la piscine de Siloé et en se lavant les yeux. Il aurait pu guérir les yeux de l’homme simplement en parlant, comme il l’a fait en d’autres occasions. Mais c’était un jour de sabbat et un moment propice à l’enseignement. L’homme est guéri, exclu de la synagogue et devient un disciple de Jésus. Tout cela parce qu’il a travaillé le jour du sabbat.

Dans l’épître aux Colossiens 2.16-17, l’apôtre Paul nous donne des instructions : « Que personne donc ne vous condamne au sujet du manger ou du boire, ou au sujet d’un jour de fête, ou de nouvelle lune, ou de sabbats; C’était l’ombre des choses qui devaient venir, mais le corps en est en Christ. »

Si le sabbat est l’ombre des choses à venir, quelles peuvent bien être ces choses ? Je pense que le livre d’Ésaïe contient la meilleure description de la véritable signification du sabbat : « Si tu retiens ton pied au jour du sabbat, pour ne pas faire ta volonté dans mon saint jour; si tu appelles le sabbat tes délices, et honorable ce qui est consacré à l’Éternel; si tu l’honores plutôt que de suivre tes voies, de faire ta volonté et de dire des paroles vaines: Alors tu trouveras des délices en l’Éternel; je te ferai passer par-dessus les hauteurs du pays, et je te nourrirai de l’héritage de Jacob, ton père; car la bouche de l’Éternel a parlé. » (Ésaïe 58.13-14).

Honorer Dieu: « ne pas suivre ses propres voies, ne pas trouver son propre plaisir, ne pas dire ses propres paroles », cela ne ressemble-t-il pas à une description de la vie chrétienne ?

« Afin de montrer dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, par sa bonté envers nous en Jésus-Christ. Car vous êtes sauvés par la grâce, par le moyen de la foi; et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu; Ce n’est point par les oeuvres, afin que personne ne se glorifie. Car nous sommes son ouvrage, ayant été créés en Jésus-Christ pour les bonnes oeuvres, que Dieu a préparées d’avance, afin que nous y marchions. » (Éphésiens 2.7-10).

Nous ne sommes plus contraints d’accomplir certaines œuvres et de nous abstenir d’autres pour gagner notre salut. Les œuvres que nous accomplissons maintenant ne sont pas les nôtres, mais l’œuvre du Saint-Esprit de Dieu en nous. Nous sommes libres.

Telle a toujours été la conception anabaptiste-mennonite du sabbat. Menno Simons pensait apparemment que cela était suffisamment bien compris pour qu’il n’ait pas besoin d’en dire plus. Il n’y a que deux brèves déclarations dans ses écrits : « … le vrai sabbat est observé en Christ en se dépouillant du corps pécheur de la chair… » et « Ils gardent et sanctifient le sabbat du Seigneur (qui n’est plus littéral, mais spirituel, et qui ne prend jamais fin avec les vrais chrétiens)… par la crainte de Dieu, par une conscience claire et une vie irréprochable, dans l’amour de Dieu et de leurs prochains ».

Heinrich Funk, le premier évêque mennonite d’Amérique du Nord, décédé en 1760, l’a résumé de manière très succincte et claire. Il a écrit :

« Jésus, qui était le fondement et l’auteur du sabbat, est venu restaurer le sabbat dans toute sa puissance et sa signification, afin de rendre à l’humanité le repos de l’âme. Il a offert son propre corps pour le péché commis dans le jardin d’Eden et qui s’est abattu sur toute l’humanité, apportant ainsi le repos de l’âme à toute l’humanité (Ésaïe 53 ; 1 Pierre 2.24). C’est pourquoi le corps du sabbat ou le vrai sabbat a été accompli en Christ (Colossiens 2.16,17), de sorte que l’homme jouit maintenant du vrai repos sabbatique pour l’âme en Christ ». (Restitution, page 244).

La Combe

Le soleil sur le val se couche en oranger,
Et son disque d’or pâle dans le ciel lavé,
Pose mille paillettes sur les feuilles qui tombent,
En nuages d’écus, des saules dans la combe.

Il a plu tout le mois et le sol d’eau gorgé,
Dans ce creux de la terre, accueille en mordoré,
Venant de l’infini où l’astre d’or décline,
Les doux rayons du soir qui en flaques scintillent.

La femme émerveillée traversait avec peine,
Au flanc du mont pentu, le bois sombre des chênes.
Car les pierres mouillées, dans le chemin montant,
Sous les feuilles tombées, rendaient son pas glissant.

Elle portait courbée, comme dans son enfance,
Son vieux sac à dos bleu, bien lourd et bien gonflé
Par la petite tente de ses jeunes vacances,
La toile, les piquets, le duvet du coucher.

Et le sentier s’élève dans le sous-bois qui sombre
Peu à peu dans le soir et qui s’estompe d’ombre.
Elle parvient enfin, après les résineux,
Au pied du roc aride, c’est l’endroit périlleux.

Il faut encore franchir l’étroite cheminée,
Où la roche fendue ménage un escalier.
Son souffle devient court, son cœur bat la chamade,
La nuit tombe, elle est seule, sa voie se fait bravade.

Dans l’escalier de pierre qui la mène au plateau,
Elle affermit ses prises et parvient tout en haut.
Quand le sac tombé, elle lève les yeux,
Quand elle a redressé son vieux dos douloureux,

La terre disparaît, d’obscurité noyée.
Alors à son regard s’ouvre l’éternité.
L’étendue infinie des astres se dévoile,
Le monde en expansion lui offre ses étoiles.

La Grande Ours, la Petite et l’étoile polaire,
Cassiopée, Andromède à tant d’années-lumière!
Constellations, étoiles, le ciel est sans limite.
Dans cette immensité, elle est là si petite!

Elle s’est installée et a passé la nuit,
Son matelas gonflé, loin du monde et du bruit,
Remerciant comblée, le puissant Créateur,
Pour son si grand amour et toute cette splendeur.

-Annick Markmann