DU TÉMOIGNAGE D’IGNACE TOUCHANT LE BAPTÊME
Il est dit qu’Ignace prospéra entre l’an 71 et l’an 111. Il fut le deuxième évêque d’Antioche après Pierre et, selon les chroniques, il s’acquitta des devoirs de sa charge au temps de l’apôtre Jean. Écrivant sur le baptême, il n’en parle que d’une manière qui implique clairement qu’il doit être accompagné de foi, d’amour et de patience.
Dans sa Lettre à Polycarpe, l’évêque de Smyrne, il écrit entre autres ces mots : Qu’aucun de vous ne soit trouvé apostat : « Que votre baptême soit votre arme, votre foi votre casque, l’amour une lance, la patience une armure complète ».
Dans une Lettre aux Tralliens, il écrit également : « Il me semble que vous ne vivez pas selon la chair, mais selon Jésus-Christ, qui est mort pour nous ; afin que, croyant en Sa mort, vous puissiez, par le baptême, participer à Sa résurrection. »
Et encore, dans la lettre adressée à ceux de Philadelphie, il écrit ainsi : « Voyant, donc, qu’il y a un seul Dieu et Père non engendré et un seul Fils, Verbe et Homme engendré, un seul Consolateur, l’Esprit de Vérité, et une seule foi, un seul baptême et une seule Église, que les apôtres ont fondée avec leur sueur et leur travail, dans le sang de Christ d’un bout de la terre à l’autre, c’est pourquoi vous, en tant que peuple particulier et génération sainte, devez aussi faire toutes choses avec un cœur unanime en Christ ».
Qui ne voit pas qu’ici Ignace, en joignant dans cet ordre ou séquence, la prédication, la foi, le baptême et l’Église, entend dire que selon l’ordonnance de Christ, la prédication a la première place et, par conséquent, doit précéder ; qu’après la foi vient le baptême, et qu’après le baptême celui qui est baptisé est membre de l’Église ? et qu’alors les membres de l’Église, en tant que peuple particulier et génération sainte, doivent faire toutes choses avec un cœur unanime en Christ ? Car c’est là le sens des paroles d’Ignace. Voir, concernant les lettres d’Ignace citées plus haut, H. Montanus dans De nietigheyd van den Kinder-doop, 2e impression, p. 4 et 5. Aussi, Jacques du Bois (bien qu’il interprète mal ces mêmes lettres), Contre Montanus, imprimé en 1648, p. 16-22.

IGNACE, DISCIPLE DE L’APÔTRE JEAN, DÉVORÉ PAR DES FAUVES
DANS UN CIRQUE À ROME, À CAUSE DU TÉMOIGNAGE DU FILS DE DIEU,
EN L’AN 111
Ignace, disciple de l’apôtre Jean et successeur de Pierre et d’Évode, était au service de l’Église de Christ à Antioche en Syrie. C’était un homme craignant Dieu, très pieux, fidèle et diligent dans ses ministères. Il était surnommé Théophore, c’est-à-dire, Porteur de Dieu, apparemment parce qu’il portait souvent dans sa bouche le nom de Dieu et de son Sauveur et qu’il menait une vie pieuse. Il avait coutume de dire fréquemment : « La vie de l’homme est une mort continuelle, à moins que Christ ne vive en nous. » De même : « Le Christ crucifié est mon seul et entier amour. » Et : « Celui qui se laisse appeler d’un autre nom que Christ n’est pas de Dieu. » Et encore : « Autant le monde hait les chrétiens, autant Dieu les aime. »A. Mellin., fol. 15, col. 1, de Ignat. in Epist. ad Rom. et alibi. etc.
Ayant appris que l’empereur Trajan, après les victoires qu’il avait remportées contre les Daces, les Arméniens, les Assyriens et d’autres nations orientales, rendait grâce à Antioche aux dieux, et leur offrait de grands sacrifices, comme si ces victoires provenaient d’eux, Ignace, comme nous l’apprend Nicéphore, en réprimanda l’empereur, et cela ouvertement dans le temple.
L’empereur, extrêmement en colère à ce sujet, fit arrêter Ignace, mais, par crainte de tumulte, parce qu’Ignace était tenu en grand respect à Antioche, il ne le fit pas punir là, mais le confia entre les mains de dix soldats et l’envoya lié à Rome, pour y être puni.
Entre-temps, sa condamnation à mort lui fut annoncée : de quelle manière et en quel lieu il devait mourir ; en l’occurrence, qu’il serait mis en pièces par des bêtes sauvages à Rome.
En chemin, il écrivit plusieurs épîtres de consolation à ses amis, les fidèles en Jésus-Christ et aussi à différentes Églises, comme à celles de Smyrne, d’Éphèse, de Philadelphie, de Tralles, de Magnésie, de Tarse, de Philippes et surtout à l’Église de Christ à Rome ; lettres qu’il a envoyées avant son arrivée là-bas. Il semble que l’idée d’être mis en pièces par les dents des bêtes sauvages était constamment présente dans son esprit pendant le voyage, non par crainte, mais plutôt par désir sincère. C’est ce qu’il mentionne dans sa lettre à l’Église de Rome, écrivant ainsi : « En voyageant de Syrie à Rome, sur mer et sur terre, de jour et de nuit, je combats avec des fauves, lié entre dix léopards[1], et plus je les caresse et me montre amical envers eux, plus ils deviennent cruels et malins. Cependant, à travers les cruautés et les tourments qu’ils m’infligent quotidiennement, je suis de plus en plus exercé et instruit ; néanmoins, je n’en suis pas justifié. Oh si j’étais déjà avec les bêtes, qui sont prêtes à me dévorer ! J’espère que d’ici peu, je les trouverai telles que je souhaite qu’elles soient, c’est-à-dire assez cruelles pour me détruire promptement. Mais si elles ne me tombent pas dessus et ne me déchirent pas, je les séduirai gentiment, afin qu’elles ne m’épargnent pas, comme elles ont déjà épargné plusieurs chrétiens, mais qu’elles me déchirent rapidement et me dévorent. Pardonnez-moi de parler ainsi ; je sais ce dont j’ai besoin. Maintenant seulement je commence à être un disciple de Christ. Je ne considère ni les choses visibles ni les invisibles dont le monde est étonné. Il me suffit de devenir participant de Christ. Que le diable et les hommes méchants m’affligent de toutes sortes de douleurs et de tourments, par le feu, par la croix, par la lutte contre les bêtes sauvages, par la dispersion des membres et des os de mon corps ; tout cela, je l’estime très peu, si seulement je jouis de Christ. Priez seulement pour moi, afin que la force intérieure et extérieure me soit donnée, non seulement pour dire ou écrire cela, mais aussi pour l’accomplir et le supporter, afin que je puisse non seulement être appelé chrétien, mais aussi être trouvé tel en vérité. » Ignat. in Epist. ad Rom.
Arrivé à Rome, il fut remis par les soldats au gouverneur, avec les lettres de l’empereur qui contenaient sa condamnation à mort. Il fut gardé en prison plusieurs jours, jusqu’à un certain jour de fête des Romains, où le gouverneur, conformément à l’ordre de l’empereur, le fit amener dans l’amphithéâtre. Tout d’abord, ils cherchèrent, par de nombreux tourments, à l’inciter à blasphémer le nom de Christ et à offrir des sacrifices aux dieux. Mais comme Ignace ne faiblissait pas dans sa foi, mais, plus le supplice durait, plus il était fortifié dans son refus d’offrir des sacrifices païens, il fut aussitôt condamné par le Sénat romain et immédiatement jeté devant les lions.
Alors qu’Ignace était emmené hors de la présence du Sénat vers l’enceinte la plus intime, ou fosse aux lions, il répétait fréquemment le nom de Jésus dans la conversation qu’il avait, en chemin, avec les croyants, ainsi que dans sa prière secrète à Dieu. Lorsqu’on lui demanda pourquoi il agissait ainsi, il répondit ainsi : « Mon cher Jésus, mon Sauveur, est si profondément inscrit dans mon cœur, que je suis convaincu que si mon cœur devait être ouvert et coupé en morceaux, le nom de Jésus se trouverait écrit sur chaque morceau. » Par cela, l’homme pieux indiquait que non seulement sa bouche, mais les parties les plus intimes de son cœur étaient remplies de l’amour de Jésus, car c’est de l’abondance du cœur que la bouche parle. Ainsi, Paul aussi, étant rempli de l’amour de Jésus-Christ, a utilisé, dans ses lettres, jusqu’à deux cents fois (selon ce qu’on a compté) le terme « Notre Seigneur Jésus-Christ ». Il emploie le nom « Jésus » jusqu’à cinq cents fois.
Lorsque toute la multitude du peuple fut rassemblée pour assister à la mort d’Ignace (car le bruit s’était répandu dans toute la ville qu’un évêque avait été amené de Syrie, qui, selon la sentence de l’empereur, devait combattre contre les bêtes sauvages), Ignace fut amené et placé au milieu de l’amphithéâtre. Alors Ignace, avec un cœur audacieux, s’adressa ainsi au peuple qui se tenait autour : « Ô Romains, vous tous qui êtes venus assister à ce combat de vos propres yeux, sachez que ce châtiment ne m’a pas été infligé à cause d’un méfait ou d’un crime, car je n’en ai jamais commis, mais pour parvenir à Dieu, que je désire ardemment, et dont la jouissance est mon désir insatiable. Car, je suis le grain de Dieu. Je suis broyé par les dents de la bête, afin que je sois trouvé un pain pur de Christ, qui est pour moi le pain de vie. » Ces paroles furent prononcées par Ignace alors qu’il se tenait au milieu de l’amphithéâtre et qu’il entendait les lions rugir, ce que les frères de l’Église qui se tenaient également parmi le peuple entendirent et attestèrent.
Aussitôt qu’il eut prononcé ces mots, deux lions épouvantables et affamés lui furent relâchés de leurs fosses, qui le déchirèrent et le dévorèrent instantanément, ne laissant presque rien, ou du moins très peu, même de ses os. Ainsi s’endormit, heureux dans le Seigneur, ce fidèle martyr de Jésus-Christ, en l’an 111, la douzième année de l’empereur Trajan. Comparez avec Abr. Mell. 1er livre de Hist. der Vervolg. en Mart., imprimé en 1619, fol. 25, col. 1-4, et fol. 26, col. 1, avec Joh. Gysii Hist. Mart., fol. 15, col. 2, 3. Aussi, W. Baudart. dans Apophth. Christian, imprimé en l’an 1640. Le premier livre, dans le second Apophtegme, sous le nom d’Ignace, pp. 37, 38, de différents autres auteurs.
[1] Toutes les traductions du grec que nous avons pu consulter ajoutent ici un élément de contexte manquant dans le texte néerlandais du Miroir : après la mention des dix léopards, Ignace précise « je veux parler des soldats qui me gardent », ce qui semble plus plausible étant donné le comportement de ces « léopards ». — NDLT
